Nathanaëlle Herbelin

Nathanaëlle Herblin, Emmanuelle et Efi

De passage au musée d’Orsay, j’en ai profité pour visiter l’exposition consacrée à Nathanaëlle Herbelin, une peintre franco-israélienne. Il n’est pas rare que l’institution demande à des artistes contemporains de mettre leurs œuvres en regard de celles présentes au musée. Ce fut une excellente surprise, le travail de la peintre m’a particulièrement parlé et séduit.

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L’adieu

Aujourd’hui, c’est la dernière épreuve du brevet. C’est fini, je ne les reverrai plus. C’est la der des ders. Ils s’en vont, et moi avec. Je quitte le collège, après vingt ans de longs et laborieux sévices. Il était temps. Je saturais de cet espace coincé entre enfance et adolescence, ces quatre années où les élèves régressent plus qu’ils ne progressent sous l’effets cumulé des hormones et des smartphones. J’ai assisté à leur dégénérescence. Les têtes trop grosses, les jambes trop courtes, les boutons d’acné mal percés, les cheveu gras et brillants, les vêtements préférés portés à outrance. J’ai observé leur corps changer, ils naviguaient dans la vallée de l’étrange, certains mantes religieuses, insectoïdes dégingandés, d’autres gnomes, hobbits, semi-hommes en attente d’une hypothétique poussée de croissance. Ils sont beaux à leur manière. Maladroits, mal à l’aise, mal dans leur peau, mal dans leur corps, avec leur voix qui vrille et hésite.

Ils m’ont rendu fou à n’écouter aucun conseil. À quatorze ans, on croit tout savoir, mais on ne sait rien. Ils se plaignent, crient à l’injustice à chaque réprimande. C’est la foire à la mauvaise foi. Au mensonge. À la désinformation. Ce sont des fake news ambulantes. Alors, pourquoi est-ce qu’aujourd’hui, dans cette salle de classe qui sent le renfermé et la sueur acide, je ressens de la nostalgie ? Une douce mélancolie m’enserre, comme si j’allais les regretter, eux qui m’en ont fait tant baver. Moi qui ai mis l’affectif sous clé à double tour, sens ma carcasse se fendiller, se craqueler, prête à s’effondrer. Pourtant, ce matin, je n’en regrette pas un. Ils vont partir, grand bien leur fasse. Mais je sais qu’ils changeront. Ils s’affirmeront, gagneront en personnalité, deviendront de beaux jeunes hommes et jeunes femmes, avec de l’ambition, des envies, des convictions et des projets qui donneront un sens à leur vie. Et j’espère que sur les 3000 élèves qui j’ai eu ici, certains se rappelleront de cette heure et demi de physique-chimie que nous avions chaque semaine. Et si pour un seul, juste un, cela aura été utile, alors mes efforts n’auront pas été vains.