La Prépa, un an après

Il y a 1 an, je publiais la première planche de ma nouvelle bande-dessinée, La Prépa. C’est l’occasion de faire un premier bilan de ce projet où j’ai expérimenté une nouvelle façon de travailler.

Bilan en chiffres

On commencera par un bilan comptable. En effet, ces projets sont, pour un amateur comme moi, très longs à mettre en place. Ainsi, après un an de travail, 19 planches sont terminées sur 64. Si on se projette, cela fera au final entre 3 à 4 ans de réalisation (sans compter l’écriture du scénario). Cela correspond à mes prévisions. Cependant, j’espérais arriver à réaliser 2 planches par mois, mais les aléas de la vie font que c’est compliqué. Entre les weekends chargés, les départs en vacances ou ma participation à l’Inktober, le rythme est difficile à tenir. Car si je dessine ce projet, j’ai aussi besoin de m’aérer et de dessiner parfois uniquement des illustrations. Pour le plaisir du dessin pur, mais aussi pour progresser !

L’avancée du projet à ce jour. 4 cases par planche : storyboard, crayonné, encrage, couleurs.

Si on se penche sur ces chiffres, on s’aperçoit que j’avance plus vite que sur Jotunheimen, tout en réalisant les couleurs. En soit, je suis plus efficace. Cela vient de ma méthode de travail, moins axée sur la publication web. Avant, je voulais publier le plus vite possible ma planche sur internet. Désormais, je travaille sur plusieurs planches en même temps, selon ce que j’ai envie de faire, crayonné, encrage ou couleur. Si je n’arrive pas à dessiner, j’encre. Si l’encrage tremble, je peins.

Le scénario

Si j’ai parfois des doutes sur la qualité et l’intérêt du scénario, j’ai un avantage sur mes lecteurs : je peux lire le storyboard comme on lit une BD. Je peux alors jauger le rythme et les enchaînements des événements.

Mon petit bouquin perso.

Actuellement, les dernières pages ne sont pas storyboardées. J’avais changé les 10 dernières pages de Jotunheimen juste avant de les faire, ayant demandé notamment si certains des thèmes traités l’avaient été suffisamment. Je me réserve donc la possibilité de modifier les dernières pages après 2 ou 3 ans de recul sur le projet.

Le dessin

J’ai déjà parlé du dessin avec ma nouvelle méthode de travail, mais deux éléments cruciaux sont à prendre en compte avec La Prépa :

  • L’encrage au pinceau
  • La colorisation à l’aquarelle

L’encrage au pinceau a apporté quelques critiques bien compréhensibles. En effet, ma maîtrise de l’outil n’est pas parfaite et l’on m’a reproché une différence notable de précision entre mes crayonnés et mes encrages. C’est vrai. Parfois, c’est dû à un encrage réalisé trop rapidement, tout simplement. Mais il ne faut pas oublier que mes crayonnés sont aussi tracés à la règle pour les décors, ce qui n’est pas le cas à l’encrage. C’est voulu, je ne veux pas des décors trop raides et froids.

En revanche, pour les personnages, les déliés du pinceau donnent beaucoup de caractère et j’aurais aujourd’hui beaucoup de mal à revenir en arrière. Quand j’encrais à la plume, beaucoup pensaient que je le faisais au feutre. Là, plus de doute possible ! Je trouve qu’il y a bien plus de caractère et de force dans mon encrage grâce à ça. Mais il est vrai que le trait est moins fin, ce qui est parfois compliqué à gérer avec des décors détaillés.

Plus concrètement, j’ai eu de gros soucis de matériel. J’utilise des feutres pinceau Pentel qui me convenaient depuis des années pour encrer mes illustrations à l’aquarelle. Il semblerait qu’il y ait eu un souci sur les cartouches, car mes feutres pinceaux se sont tous mis à couler (j’en ai acheté des neufs et j’ai eu les mêmes problèmes). Ça m’a occasionné beaucoup de galères et des prises de retard sur la réalisation des planches. Car quand la planche est tâchée, il faut la refaire (du moins les parties impactées). Ça explique parfois le manque de finesse de certaines cases. Actuellement, je n’ai plus de souci et je maîtrise mieux l’outil.

L’aquarelle était un des grands enjeux de cette BD. Au-delà de juste mettre la couleur, je craignais de faire des planches sans âme, là où Nico Archimède avait été capable d’ajouter un plus (en autres pour les scènes de nuit ou la magnifique dernière planche de Jotunheimen). Mes deux dernières planches, avec de la bichromie, montrent combien j’ai pris confiance au fur et à mesure. Pour le coup, il y a des chances que toutes mes BDs soient désormais réalisées à l’aquarelle. Après des premiers essais peu fructueux (et douloureux) sur Tout à l’ego et Salle des profs, j’ai suffisamment de bouteille pour que le résultat me convienne.

Même si ce n’est pas évident vu de l’extérieur, faire des planches à l’aquarelle est un vrai problème pour le rendu des couleurs après passage au scanner. Ce sont surtout les noirs qui ressortent de façon différente selon la couleur qui a été posée dessus (les pigments d’aquarelle sont plus ou moins transparents). J’ai testé deux techniques, plus ou moins longues. Ce n’est que pour la page 18 que j’ai trouvé une technique qui n’est pas trop laborieuse, efficace et qui reste assez fidèle au trait d’origine. Il m’aura fallu un an !

La dernière chose que j’ai expérimentée est les textes et bulles ajoutés une fois la planche terminée. C’est très pratique. En effet, les bulles sont ainsi positionnées ultérieurement et permettent de cacher des parties mal dessinées ou colorisées. Je peux bien mieux équilibrer ma case après coup. Par contre, la planche original paraît étrange, avec des vides importants. C’est assez déstabilisant. Quand je finis la couleur de ma planche, souvent je ne l’aime pas. Une fois les bulles ajoutées, tout va mieux ! Mais sans les phylactères, certaines cases paraissent mal composées.

Sans les bulles, les cases paraissent vides et/ou décentrées.

Sur ce, je vous laisse pour retourner sur mes planches. N’hésitez pas à suivre les avancées du projet sur mon compte Instagram. Je publie pas mal de crayonnés et d’étapes de réalisation des planches, sans jamais spoiler !

0 réflexion sur « La Prépa, un an après  »

  1. J’adore ton petit carnet de story board !
    L’encrage au pinceau est plus dynamique, mais c’est vrai qu’avec le Pentel, on a parfois des surprises, surtout quand on arrive sur la fin de la cartouche, c’est souvent à ce moment là que se met à couler une énorme goutte d’encre qui salope tout ! C’est drôle comme j’ai fait le chemin inverse, même si j’utilise encore parfois le pinceau, c’est devenu de plus en plus rare, préférant aujourd’hui la plume et le stylo bille (mais là aussi avec le Bic, à la moitié du réservoir, ça fait souvent des pâtés 😉 )
    Ce qui est sûr, c’est que je prends toujours beaucoup de plaisir à suivre tes BD, et je suis toujours admiratif devant les progrès de ton dessin.

  2. C’est super intéressant de voir ta méthode de travail, j’aime bien ces parties « techniques » au milieu de tes projets.
    Par rapport à tes interrogations, quelques pistes, vu que ce sont des questions que je m’étais déjà posées aussi :
    – Pour l’encrage : le pinceau Pentel est un super outil, mais à mon sens, surtout pour le croquis ou les déplacements. Ça ne vaudra jamais un bon pinceau en poil de martre, d’autant que tu peux en avoir de très fins qui te permettent une excellente précision. Avec une taille 2, tu as un trait très fin, avec une possibilité de variation de trait finalement proche de la plume, en plus dynamique.
    – Toujours pour l’encrage, pourquoi ne pas mixer les techniques ? Le pinceau pour les contours et les grandes lignes de force (lignes des membres, grandes lignes des vêtements, cheveux…), la plume pour les détails (du visage, des objets), et le feutre type liner (genre rotring ou même unipin et Cie) pour les décors d’arrière-plan. Comme ça tu peux jongler de façon assez naturelle entre dynamisme et précision.
    – Pour la couleur, ça peut être pas mal de combiner l’aquarelle avec l’écoline (type colorex). L’écoline donne une certaine densité, idéale en aplat, pour les premiers plans et les personnages, quand l’aquarelle peut très bien fonctionner pour les arrière-plans, avec sa transparence et sa capacité de modulation. Ça peut structurer les plans, et ça atténue le roblème du noir trop présent après le scan.
    – Sur ce problème de scan et de difficulté à gérer la balance noir/couleurs, c’est l’éternel problème de la couleur directe… Avant le numérique, les illustrateurs faisant la couleur à part, sur un tirage où le trait était matérialisé en bleu très clair. C’est une technique intéressante. Pour ma part, ce que j’avais déjà fait, c’est de faire mon encrage (sur papier lisse, idéal pour la plume et le pinceau), et de faire la couleur sur une autre feuille, à plus gros grain (plus adapté à l’aquarelle/écoline), soit en le faisant direct à la table lumineuse (mais ça peut déformer la perception des couleurs), soit en reprenant mon encrage au crayon bleu par table lumineuse (sachant que ça rajoute une étape), soit en faisant un tirage en bleu de l’encrage sur du bon papier (mais c’est un budget, et il faut être sûr de l’impression, notamment que le bleu ne bave pas – j’avoue que ça je l’ai jamais fait). Comme ça, tu peux retravailler individuellement le noir et les couleurs, et ensuite les réunir sur photoshop. C’est plus de taf, mais le résultat est intéressant. Sinon, la technique bourrin, c’est de scanner ton encrage, puis de mettre la couleur dessus, de rescanner la planche en couleur, de retravailler ce 2e scan sans tenir compte du noir (qui restera sans doute un peu pâlot) et ensuite de mettre ton 1er scan de noir, bien contrasté, par-dessus. Je pense que ça doit marcher.

    Voilà, sinon c’est vraiment bien comme BD, moi j’ai rien à redire sur le scénar, tes personnages et tes dialogues fonctionnent vraiment très bien et sont très crédibles.

    1. Merci pour tes conseils. J’envisage en effet, pour mon prochain de projet, de mixer les techniques d’encrage.

      Sinon j’ai essayé les « vrais » pinceaux, très fins, pour encrer, mais je n’y arrive pas. Et le noir n’est pas vraiment noir.

  3. J’allais suggérer de mixer les techniques d’encrage, mais comme ça a déjà été dit…

    Sinon, je suis impressionné par ta façon de planifier tes BDs, et à te projeter sur 3 ans. Je serais totalement incapable de bosser de cette façon. J’ai besoin d’inventer au fur et à mesure de la réalisation, d’improviser un minimum sur les grandes lignes du scénario, sinon ça ne me motive pas. Si j’ai déjà un story-board détaillé, je n’ai plus envie de passer du temps à le reproduire au propre. Probablement parce que le dessin en lui-même ne me passionne pas plus que ça, mais que je suis bien obligé de m’y coller si je veux veux voir mes histoires prendre vie!
    Donc bravo pour la masse de travail que tu arrives à accomplir!

    1. Question improvisation, j’ai arrêté. Pour qu’une bonne histoire se tienne, il faut qu’elle soit pensée d’un bout à l’autre. Après, connaissant tes œuvres, c’est un peu différent car la partie humour est très présente. La Prépa ou Jotunheimen sont des œuvres avant tout destinées à toucher le lecteur et pour cela, difficile d’improviser pour rester juste.
      Sinon, pendant les 3 ans, je ne reste pas à rien faire : j’écris d’autres scénarios et un roman. Je ne pourrais pas simplement dessiner l’histoire. J’ai trop besoin d’inventer.

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